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Anne Azéma
Le Jeu d'Amour
The game of love in medieval France
Anne Azéma, voice
with
Shira Kammen, vielle, rebec, harp
Jesse Lepkoff, flute, recorder
Robert Mealy, vielle, harp
Margriet Tindemans, vielle, gittern, harp
assisted by:
John Fleagle, harp, voice, bagpipe
Noel Bisson, voice
Catherine Jousselin, voice
Ellen Santaniello, voice
Program conceived and directed by Anne Azéma
Research, transcription and edition of original source material: Anne Azéma
Instrumental research and creation: Margriet Tindemans, Shira Kammen,
Robert Mealy, Jesse Lepkoff
L'on Dit Q'Amors Est Dolce Chose
"On a bed of flowers, they played the game of love to their heart's content."
Love is a game, and every game has its rules. In medieval France, the rules are new and give the woman, the dame, a novel status. And the game of love, thus played out with the consent of all those involved, takes on different facets or aspects, whose varied characteristics attract us still.
A first feature of this game, codified through the fin'amor (courtly love) of the musician-poets of the 12th and 13th centuries -- troubadours in Southern France, and their followers, the northern trouvères -- is not just the privilege (granted by the lord to his courtiers, and especially to the young unmarried knights) to have a full role in the life of the court, but also, and above all, is a new relationship with Woman, and with women. The noble dame, through the consent of her husband, becomes sovereign, teacher, beneficiary of these iuvenes -- young unmarried men -- and recipient of their homages .
In this new exchange, a host of other games are involved, rites created for and by the members of aristocratic societies. Our program brings together several genres and styles and encompasses several generations of trouvères from the North and North-East of France. We have mixed together texts and melodies which are the true heirs of the fin'amor of the South, aristocratic in composition and in form ("Amour me fait conmencier" or the great "Lai du Chevrefeuille"), with a lighter repertoire. These latter pieces probably reflect a more popularising or pastoral reality and bring us near to the domain of the dance, as in "La jus desouz l'olive" .
Unlike the poetic repertoire of the South, in which certain texts are signed by women, it is more than doubtful that any of the trouvère texts which concern us are actually by women authors. Nevertheless, by collecting texts which speak in the feminine voice ("L'on di qu'amors est douce chose", "Prendés i garde", "En un vergier") we can get a glimpse of how women may have participated in the poetic, musical and social life of medieval French society.
During the May fêtes , rural women and girls were relatively free as far as their actions and their bodies were concerned . One whole segment of trouvère literature is steeped in this spirit of the first loves of May, in their permissiveness and in their playful quality. We know little about the caroles , probably sung and danced, in procession or in the round, outside. The very few we have in written sources are just a token of a very vivid monophonic repertoire of "amateur" or public music and dance making. However, these caroles very often found their way in higher-brow music (as in motets, for example), which is a testimony to their popularity.
The so-called weaving songs ( chansons de toile ) also speak in the feminine first person. Of a rather melancholy and languid character (although "En un vergier" ends well!), with refrains, they are generally narrative. These songs about unhappily married women, ill-mated, (and one here about a woman who is beaten), have a personal touch and are rich in picaresque commentaries. Ours is set in an orchard and makes allusion directly to the misconduct of the abusive husband, who knows full well that he is at fault for beating his wife; since by so doing he is endangering his position with his father-in-law!
Apart from the unresolved questions - notably in relation to rhythm - linked to the notation system in this repertoire, there is another issue which has divided scholarly opinion for several generations: the presence (or absence) of instruments. The problem and the challenge of instrumental medieval music comes from the fact that a large part of this repertoire belongs to minstrels and jongleurs, whose art was transmitted orally. There are only a few surviving sources of purely instrumental music (thirty or so from the thirteenth and fourteenth centuries.) Since there are no separately notated instrumental lines in the chanson repertoire, our evidence has to be indirect. The repertoire of the North of France is, in a certain way, the one which lends itself most easily to inclusive choices: several sources clearly mention strings being touched in relation to the caroles or lays. Moniot d'Arras plainly describes the couple dancing in the orchard to the sound of the vielle.....
But just as for the rather vague medieval descriptions of the desired vocal colour, "clere, plaisant et bele" (clear, pleasant, and lovely), the mention of the presence of instruments is not sufficient to determine their function. We have tried to follow in the footsteps of the medieval jongleurs by putting together our own music, based on preexisting vocal sources, and using the medieval methods of teaching (learning by heart, improvisation, rhetoric). It is in this spirit that we hope to create a new instrumental medieval sound, une chançon novele .
Anne Azéma , translated by Peter Ricketts
(with Shira Kammen, Margriet Tindemans, for participation on the notes for instrumentation)
L' amour est un jeu, et tout jeu a ses règles. En France médiévale, celle-çi sont nouvelles, et donnent à la femme, la "dame", une condition inédite. Mené avec le consentement de tous ceux impliqués, le jeu d'amour revêt alors plusieurs visages dont les aspects variés nous ont attirés.
Un premier aspect de ce jeu, codifié par la fin'amor des Troubadours du sud de la France, bientôt copié par les Trouvères du nord, poètes-musiciens des 12éme et 13 éme siècles, est non seulement le privilège accordé par le seigneur à ses courtisans et tout spécialement aux jeunes chevaliers non mariés à participer à la vie de sa cour, mais est aussi, et surtout, un nouveau rapport à la femme. Elle devient, par décision et permission de son époux, maîtresse, éducatrice, bénéficiaire et récipiendaire des hommages de ces juvenes, jeunes hommes non mariés. Comme son mari au centre du véritable pouvoir, elle est en position de juger les valeurs de chacun, de couronner le meilleur et de participer ainsi au système de relation du vasselage. Dans ce nouvel échange, se mêle une multitude d'autres jeux, rites créés pour et par les membres de sociétés aristocratiques. Celles-çi, devenues prospères en grande partie grâce à une expansion des terres agraires qui leur permettent de s'installer et de dominer, deviennent des bouillonnements culturels importants, dont les traces sont parvenues jusqu'à nous à travers les milliers de poèmes de trouvères (dont un grand' nombre avec mélodies) de formes et styles variés. Ces textes et mélodies sont généralement conservés dans des collections, ou chansonniers, compilées après le fait (posant ainsi plusieurs problèmes non résolus de transmission et de notation musicale y compris de rythme). Des motets à textes séculiers à deux , trois ou quatre voix sont également parvenus jusqu'à nous .
Notre collection est un choix qui réunit plusieurs genres et styles et embrasse plusieurs générations de trouvères du nord et nord-est de la France. Il nous a semblé intéressant d'y mêler des textes et mélodies vraiment héritiers de la "fin'amor" du sud, de composition et de forme aristocratiques ("Amour me fait conmencier" ou le grand "Lai du Chèvrefeuille"), à un répertoire plus léger, mirroir d'un fait plus "popularisant" et "campagnard", répertoire proche du domaine de la dance comme "La juz desouz l'olive" ou comme la pastourelle de Guillaume le Vinier, grande fête et concours champêtre (probablement de la région d'Arras) avec danses, "rabardies" et "espringueries", instruments, et joyeuses descriptions des faits de tout un chacun, y compris du fils du prêtre d'Oignies......
À l'inverse du répertoire poétique du sud de la France où certains textes sont signés par des femmes, il est plus que douteux qu'aucun des textes de Trouvères qui nous aient arrêtés soit le fait réel de femmes. Néanmoins, réunir des textes parlant au mode féminin ("L'on di qu'amors est douce chose", " Prendés i garde", " En un vergier") peut permettre d'entr'apercevoir plusieurs possibilités de participation féminine dans la vie poétique, musicale, et sociale de la société médiévale du nord de la France.
"Amour me fait conmencier", "L' on dit qu'amours" et le lai lyrique "del kievrefuel" sont préoccupés avant tout de forme -un autre aspect ludique- , et de la problématique de la "fin'amor", tout comme leur modèles troubadouresques. De façon pratiquement syllabique, on chante de "la bel' au corps gent", on se plaint d'avoir été "traïe", on ne cherche d'autre joie que celle de "plaire", on redoute le "courous" de la dame, on s'effraie de la signification cachée du baiser, récompense qui a "maint amant traï", et en espérant la "merci", plein de "penser sans félonie" on espère en mourant, comme Pyrame, ouvrir les yeux au nom du bien-aimé. Bien que parfois le genre soit féminin, la problématique n'est pas fondamentalement différente, ni la forme. Quelques générations plus tard, L'Escurel traitera des mêmes thèmes lyriques -le baiser, par exemple- , mais avec un support musical très fluide et ornementé qui le démarque ainsi des monodies simple déclamation de textes des premiers trouvères.
Hormis la participation des femmes mariées aux cours aristocratiques, il y a un domaine ou les femmes et les filles campagnardes étaient relativement libres de leur faits et de leur corps: les fêtes de mai. Toute une partie de la littérature des trouvères baigne dans cet esprit des premiers amours de mai, de leur permissivité et de leur ludicité, en miroir de faits réels existant alors sur les terres dont ces cours vivaient. Nous ne savons que peu de choses sur les caroles et rondels, sinon que ces courtes phrases monophoniques semblent d'influence "populaire". Les caroles étaient probablement chantées (peut-être à une voix avec un groupe lui répondant) , et dansées (par "dames et pucelles"), en procession ou en rond, à l'intérieur comme à l'extérieur, "Souz la verte olive, enmis les prés". Certaines donnent parfois des notes très précises, comme l'ordre de surveiller la position des bras ("remirés vos bras") dans une des caroles choisies, "C'est dessouz l'olive" . Les rondels étaient eux-aussi probablement des danses, en rond comme leur nom semble l'indiquer, de forme fixe à refrain. Tous ces morceaux courts ont, en quelques phrases, un pouvoir évocateur très fort, lié tant à la répétition de la forme, qu'aux pouvoirs des images (celui qui jamais ne se lasse de regarder les yeux de son meurtrier en amour, "Jamais ne serai saous", ou Margot et son ami noyé). Plusieurs motets gardent en teneur certaines de ces courtes mélodies ("Prenés i garde", "Tut cil qui sunt enamourat") qui semblent attester de la popularité de ces airs. Mais Adam de la Halle porte le rondel a des sommets inégalés: trois voix (ici deux chanteurs et une vièle), déclamant un même texte ensemble, lui donnent, en quelques minutes de musique une nouvelle force expressive.
Les chansons dites "de toile" parlent elles aussi à la première personne féminine. De caractère plutôt languissant (bien qu' "En un vergier" se termine bien!), avec refrains, elles sont généralement narratives -en"jeu"- , mises souvent en scène elle-même dans des romans (comme c'est le cas pour la nôtre dans le Roman de la Violette) et parlent souvent de pauvre filles de roi très malheureuses -thèmes toujours présents dans les chansons dites "populaires"de nos jours. Ces chansons, de mal-mariées, mal assorties et ici, de femme battue, ont un ton personnel et abondent en commentaires. La nôtre est mise en scène dans un verger, et fait directement allusion à l'erreur du mari abusif, qui sait très bien qu'il commet une faute en battant sa femme, car il risque de mettre sa position en danger vis à vis de son beau-père qui, après tout, est le chef de sa maison! Il est intéressant de noter qu'à l'inverse d'autre styles de morceaux choisis ici, nous ne possédons pas de modèles troubadouresques directs pour ce genre. Et pourtant, comme dans les chansons de mai du sud, la femme mariée sera consolée par l ' amant, "soz une ante ramée".
Hormis les questions non résolues -notemment de rythme- liées à la notation dans ce répertoire, il en est une autre qui divise depuis plusieurs générations les commentateurs de ce style: la présence d'instruments. Le répertoire du nord de la France est, d'une certaine manière celui qui se prête le plus à des choix inclusifs: plusieurs sources clairement mentionnent des cordes frottées concernant les caroles, ou les lais. Moniot d'Arras décrit sans détour le couple dansant dans le verger au son d'une vièle. La pastourelle de Guillaume le Vinier donne un catalogue d' instruments à vents, autres que la "turelurete" (cornemuse) , qui accompagnent les danses chantées de la fête de "ceux de Feuchières et Aties". Mais de même que pour des descriptions médiévales de couleur vocale souhaitée, "clere, plaisant et bele", la mention de présences d'instruments ne suffit pas à déterminer leur rôle...! Ce problème et challenge de la musique médiévale instrumetale vient de ce qu'une grande partie de ce répertoire est le fait de ménestrels et de jongleurs, dont l'art était transmis oralement. Comme l'église interdisait l'usage d'instruments pendant les offices, et comme c'est malgré tout en son sein que bien des manuscripts ont été copiés, il n'y a que très peu de sources de musique purement instrumentale (une trentaine de morceaux des 13 et 14ème siécles). Nous nous sommes essayés à suivre les pas des jongleurs médiévaux en construisant et adaptant notre propre musique, basée sur des sources vocales préexistante, et utilisant les méthodes d'enseignement médiévales (apprentissage par coeur, improvisation, rhétorique). C'est dans cet esprit que nous espérons créer un nouveau son médiéval instrumental, "une chanson nouvelle".
Anne Azéma
(Avec la participation de Shira Kammen, Margriet Tindemans et Robert Mealy pour les commentaires instrumentaux).
She sings of the courtly game of love, with its rules and sophistication, but also of the more unruly pastoral delights of May Day celebrations, the "caroles" and "rondels". One of the most stun- ning pieces is the fully developed Lai del Kievrefuel - the Lay of the Honeysuckle, traditionally the love-song composed by Tristan for Isolde and so- called because no plant in the woodland is sweeter or more fragrant. It begins with a long instrumen- tal introduction, followed by fiery, passionate singing and one section comes across as hoarse semi-speech.
Instruments - fiddles, rebec, flute, recorder, harp - play a large part, both independently, as introductions or interludes, and as discreet accom- paniments, to complement the voice. But there are also a number of unaccompanied songs, and this variety is refreshing. The sound quality is excellent. Delightfully entertaining and instructive. MB
Anne Azéma posseses a luminous voice, whose timbre is not at all over-characterized, thus allowing her to utilize diverse approaches to singing. Her diction is always clear, and so one can follow the texts without being obliged to read them -- a rather unusual privilege in this repertoire, and especially remarkable since her singing style is always dynamically alive and dramatically present. Her colleagues are members of the American school of medieval instrumentalists whose merits are by now well known. Their contributions are lively, and the instrumental ensemble colors delicious (for instance, En Mai , mixing flute, gittern, and harp). Here, too, the dynamism of the interpretations fairly breathes the joy of music-making. The listener is swept up in a feeling of exuberance -- and that is one of the best guarantees that the eternally youthful message of these seven-hundred year old pieces not be sacrificd on the altar of musicological hairsplitting.
Marc Desmet
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